Cycle O10C – #8 Ciblage

15-40 Partners vous présente la huitième étape de son cycle de réflexion appelé Odyssée.

Odyssée est le fruit d’une réflexion collective sur 10 sujets impactant l’entreprise dans le contexte actuel et pour l’anticipation de son avenir. Le cycle O10C que nous vous proposons se décline en 10 points de vue publiés dans les prochaines semaines sur le compte LinkedIn de 15-40 Partners.

 

Penser l’avenir de l’entreprise, et plus largement de la société, passe aujourd’hui par une démarche plus ciblée sur des enjeux de Gouvernance. Cette démarche entamée depuis quelques années déjà par la prise en compte des dimensions ESG dans la stratégie des entreprises devient un marqueur de leur pratique et de leur transformation, amplifiée par les circonstances actuelles.

Ces initiatives sont inscrites notamment dans le mouvement des politiques publiques de refinancement de l’économie selon des schémas plus respectueux de critères environnementaux et climatiques. Le plan de relance de la nouvelle administration Biden rejoint ainsi le plan Européen adopté en réponse à la crise actuelle. Celle-ci oblige les entreprises à revoir et réévaluer les tendances déjà à l’œuvre qui influent sur leur vision des modes opératoires de leurs organisations, leurs process, leur fonctionnement. Elle les encourage aussi à mieux définir leur Raison d’être.

Aujourd’hui, par exemple, près d’un tiers des entre-prises du SBF 120 ont défini et communiqué sur leur raison d’être, mais seuls 10% d’entre elles l’ont véritablement inscrit dans leurs statuts. Et parmi elles, encadrées par la loi PACTE, sept sont liées directement (via l’APE) ou indirectement (via la CDC) à l’Etat : EDF, Engie, Groupe ADP, La Française des Jeux, Orange, Icade, ou indirectement, GTT. Les cinq autres sociétés sont issues de familles ou d’entrepreneurs engagés, Atos Worldline, Carrefour, Danone et Kering. Pour autant, il y a encore du chemin à parcourir et des entreprises à convaincre, quand on voit l’impact et les interprétations divergentes que peuvent révéler les dessous de l’éviction d’Emmanuel Faber de Danone, entreprise à mission.

Plus particulièrement, deux grands acteurs ont en main une capacité de transformation ciblée des entreprises ; les conseils d’administration, d’une part, peuvent agir de l’intérieur, et d’autre part, de l’extérieur, les gestion-naires d’actifs influent grandement sur des leviers essentiels de transformation et de la Gouvernance, la valorisation et le vote.

Les Conseils d’administration d’abord guident et contrô-lent les stratégies des entreprises et appuient les directions générales dans leur définition de la stratégie, des objectifs et des moyens. Les membres des conseils d’administration notamment, par leur présence dans les instances de gouvernance des entreprises ont les moyens et la responsabilité d’agir directement sur les pratiques, comportements, trajectoires et cibles de leur transformation. La loi Pacte en France les aide grandement et leur donne un schéma directeur, qui éclaire le chemin, encourage à entreprendre et parfois sanctionne les manquements.

De manière plus directe, une tribune collective des acteurs de la gouvernance[1] sensibilise à la nécessité d’agir sur certains leviers clés :

  1. i) d’abord la participation en amont dans la définition d’une stratégie de création de valeur durable plutôt qu’une consultation finale pour en valider les paramètres, ii) ensuite en étant plus actif dans la cogestion du partage de la valeur avec la direction générale pour en faire un élément d’adhésion au sein de l’entreprise, iii) et en encourageant au dialogue actionnarial pour favoriser la cohésion et éviter que l’activisme externe prenne en otage l’image et la valeur de l’entreprise.

Enfin,  agir pour la mise en place d’un comité RSE doté d’influence, en situation d’éclairer et de définir des objectifs et critères de progrès durables ne peut que conforter une bonne gouvernance.

D’un autre côté, les gérants d’actifs, actionnaires structurels et globaux des entreprises par le biais de la détention, ou non, des actifs en portefeuille influent directement sur leur valeur boursière immédiate ou de long terme. Ils leurs assurent aussi des capitaux stables pour accompagner leur croissance. Par ailleurs, les droits de vote qu’ils exercent en assemblée générale ciblent les stratégies des entreprises, encouragent à l’adoption de bonnes pratiques, les accompagnent ou les sanction-nent. Le déploiement des critères ESG et de bonne gouvernance dans leurs pratiques d’investissement et de vote mettent désormais sous pression et observation constante les directions générales et leurs conseils d’administration.

Nous constatons désormais que les actifs qui obéissent à des critères ESG détenus par les sociétés de gestion ayant adhéré aux principes d’investissement responsable (PRI) de l’ONU ontprogressé de manière forte, passant de 12 000 milliards de dollars en 2012 à 42 000 milliards en 2020, avec une croissance annuelle de près de 20%. Ce ciblage de l’épargne longue sur des critères ESG devrait représenter plus de la moitié des actifs gérés d’ici quelques années. Certains grands acteurs comme BNPParibas AM ou Robeco ont déjà intégré les indicateurs ESG à l’ensemble de leur gestion et d’autres gérants de plus petite taille tel que Mirova en France ou Impax en Grande Bretagne ont exclusivement ciblé leur gestion et leur raison d’être sur des objectifs de développement durable. Aussi bien les pratiques que l’ensemble des produits proposés par ces deux derniers ont vocation à accompagner la transition vers une économie plus responsable.

Plus timides en volume (moins de 1% des actifs) mais bien vigoureux en croissance récente, le sous-ensemble des investissements à impact trouve un écho extrêmement porteur auprès d’un public en quête de sens et séduit par la capacité de mesurer directement l’impact de leur investissement sur des critères concrets.

Ce ciblage de l’épargne, l’implication des conseils d’administration, l’anticipation des risques et des opportunités liés au développement durable, et l’attitude des consommateurs oblige progressivement les entreprises à changer leurs attitudes même si les résultats tangibles seront plus longs à intervenir.

La prochaine étape de l’O10C portera sur la Compliance.

 

15-40 Partners’ Editorial Board

16 Juin 2021

 

[1] La Tribune.fr www.latribune.fr/opinions/tribunes/apres-la-crise-inventer-une-nouvelle-gouvernance-responsable-des-entreprises-877590.html

 

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